lundi 14 juin 2010

Les meilleurs polars jamais adaptés au cinéma.

Stéphane Picher, libraire, édimestre sur librairiepantoute.com


Attention : dans ce texte, je veux parler, littéralement, de polars jamais adaptés au cinéma. Il y en a beaucoup, bien sûr, alors j’ai choisi « les meilleurs d’entre eux ». Meilleurs comment? Meilleurs en tant que potentiellement adaptables sur la grande toile blanche qu’on regarde dans le noir.
Vous arrive-t-il parfois de vous demander pourquoi telle ou telle œuvre n’a jamais été adaptée, alors qu’elle semble avoir toutes les qualités potentielles d’un bon film? Il est vrai qu’il y a là un piège d’appréciation; plusieurs livres à l’adaptation difficile ou réputée impossible ont donné de bons films. Même des grands films (Fight Club, disons). Plusieurs livres à succès ont raté un peu, beaucoup, complètement, leur passage au septième art (la liste est longue, de Créance de sang à Da Vinci Code et Le Dahlia Noir, pour s’en tenir au polar récent).
Les tiroirs d’Hollywood sont pleins de rêves jamais réalisés, de projets en attente de financement, d’intentions mal assumées et de scénarios mille fois bricolés, mais pas encore tournés. Beaucoup de droits d’adaptation sont achetés et renouvelés chaque année, mais relativement peu de films adaptés de livres voient le jour.
Parmi les meilleurs polars jamais adaptés au cinéma, il y en a même qu’on n’a, en fait, jamais vraiment envisagé de produire. Par exemple, aucune trace d’un projet d’adaptation du Poète, de Michael Connelly, pourtant réputé le meilleur de son auteur (c’est en tout cas mon avis). Les histoires de tueurs en série n’ont plus la cote? Il y eut autrefois trace d’un projet d’adaptation de Nécropolis, d’Herbert Lieberman, mais cette idée semble morte depuis longtemps, si j’ose dire. Normal : Nécropolis est un livre culte dans la francophonie, mais aux États-Unis, le livre n’est plus disponible, oublié de presque tous. C’est pourtant le premier classique du roman « de médecine légale » et une étude de caractères bouleversante. C’est aussi une vision hallucinante du New York des années 1970. Il y a une épitaphe toute trouvée pour la future tombe de Herbert Lieberman : Nul n’est prophète en son pays.
Il est surprenant que La Griffe du chien, de Don Winslow, ne soit pas en adaptation. Ce « grand roman du trafic de drogue en Amérique », fresque hallucinante, épique, serait du bonbon pour un Oliver Stone... qui a décidé d’adapter un livre à paraître de Winslow, Savages, qui traite d’un sujet semblable. Un autre Winslow doit en principe être adapté au cinéma : les droits de L’Hiver de Frankie Machine appartiennent à Robert De Niro, qui devait en faire son film de retrouvailles avec Martin Scorsese. Aux dernières nouvelles, il semble que Michael Mann sera plutôt aux commandes (les retrouvailles Scorsese / De Niro se feront probablement pour le biopic de Sinatra). Mais Frankie Machine ne cesse d’essuyer des reports. Croisons les doigts : De Niro serait parfait dans ce rôle de tueur à gages à la retraite; peut-être même un peu trop, à bien y penser.
White Jazz, la conclusion du brillant « Quatuor de Los Angeles » de James Ellroy, est un film qui sera tourné « bientôt » depuis plus d’une décennie. Nick Nolte (producteur et acteur) et George Clooney (réalisateur, producteur et peut-être acteur) ont un moment été « attachés » aux différentes versions du projet. Ça semble au point mort pour l’instant. Il est vrai qu’Ellroy n’est pas très facile à adapter. Le Dahlia noir a grandement déçu (un « director’s cut » sur DVD pourrait modifier notre opinion, mais pas trace pour l’instant), mais L.A. Confidential est un film superbe, bien que sans doute pas aussi essentiel que le roman. Quant à la trilogie Underworld USA (American Tabloid, American Death Trip et Underworld USA), le projet de télésérie d’HBO est aussi lettre morte. Le « demon dog » n’est sans doute pas assez glamour pour le grand public.
Quant à l’étonnant Club des policiers yiddish, de Michael Chabon, qui sortira en poche d’une semaine à l’autre, il est prévu pour être l’un des prochains films des frères Coen. Leur producteur, Scott Rudin, a acheté les droits du roman et déclaré plusieurs fois en entrevue qu’il leur réservait. Fred Melamed (Sy Ableman dans A Serious Man) aurait un rôle dedans (je le verrais bien en Landsman). Parlant des « frères Coen brothers », plusieurs scénarios d’eux croupissent dans les tiroirs de la machine hollywoodienne; ce qui est dommage, étant donné leur immense talent. L’un d’entre eux est Cuba Libre, d’après le roman du même nom d’Elmore Leonard.
Maître Leonard est l’un des auteurs les mieux adaptés au grand écran. Pensons à Hombre, 3 Heures 10 pour Yuma, Out of Sight ou Jackie Brown. Plusieurs de ses livres sont dans le collimateur hollywoodien. Freaky Deaky (en français Les Fantômes de Détroit) est en préproduction; il devrait sortir en 2011. La Joyeuse kidnappée (The Switch), une sorte de « préquel » à Jackie Brown, puisqu’on y retrouve les personnages Ordell Robbie (Samuel L. Jackson) et Louis Gara (Robert De Niro), est prévu quant à lui pour 2012. Pas d’autre détail pour l’instant mais, bien sûr, Jackson et De Niro sont trop vieux pour reprendre leur rôle. Le numéro un sur ma liste de souhaits est Road Dogs (à paraître en français cet automne), suite à Loin des yeux (Out of Sight). Jack Foley (George Clooney) sort de prison après trois ans (au lieu des trente prévues), saura-t-il rester loin des tentations et des mauvaises influences? Pour le moment, le « roman est dans les mains de Clooney », disait en entrevue Elmore Leonard il y a quelques mois. Et Steven Soderbergh? Il ne peut être partout à la fois.

Le Gang de la clé à molette, roman environnementaliste culte d’Edward Abbey, est un autre exemple de projet reporté pendant des décennies. Robert Redford pensait le faire autrefois. Aux dernières nouvelles (pas très fraîches), Catherine Hardwicke devait en réaliser une adaptation. Pour ce qui est d’Un pays à l’aube, de Dennis Lehane, on sait que les droits de ce roman historique ont été achetés par la boîte de production de Sam Raimi (Spider-Man); mais il semble que rien n’ait bougé depuis. Dommage! Quand on voit la quantité de scénarios tiédasses qui sont produits chaque année, chaque semaine même, pourquoi ne pas faire confiance à un bon livre?

2 commentaires:

  1. Tu proposes de très bons choix de lecture ...

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  2. Mais c'est nul cet article. D'abord vous parlez beaucoup de projets qui ne se font pas et non de vraies découvertes, ensuite, j'ai l'impression à vous lire qu'il n'y a que des auteurs américains qui valent la peine. Et les francophones? Et les scandinaves? Et les anglais? Vous nous mettez l'eau à la bouche (avec des bonnes recommandations de lecture, certes), mais pas de vraies nouveautés…La prochaine fois?

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